Citation - Baudelaire : La force du coeur
"Elle avait dans ses yeux la force de son coeur."
Charles Baudelaire
Les yeux ont toujours été considérés comme étant une ouverture directe sur l'intériorité humaine, et même -dans une dimension plus spirituelle - à l'âme. Un regard bienveillant présente une personnalité dotée d'une certaine bonté, des yeux fuyants cachent une insanité dérangeante, un œil amoureux porté sur autrui illustre un cri du cœur. Aussi, tout regard est une présentation directe et non voulue de son intimité, une traduction involontaire de sa pensée.
Cette femme inconnue (soyons vieux genre, et considérons l'utilisation du pronom « elle » comme étant une personnage féminin), appartenant à l'univers baudelairien, est littéralement réduit à ses yeux. Pourtant, l'ensemble de sa personne nous paraît présenté. Indisciplinée, forte et déterminée, elle devient, en un seul regard, une véritable amazone pour autrui. Ses yeux semblent alors le premier lanceur de l'action à suivre ; par un regard, toute hésitation est éteinte et toute force en naît.
L'adage « les yeux sont le reflet de l'âme » fait écho à Baudelaire et à son auditoire. Prendre conscience que notre œil est la vitrine de notre intimité permet une brutale remise en question : mes yeux traduisent-ils une volonté de vivre, une angoisse réelle, un amoureux interdit ? Montrent-ils ma force ou ma faiblesse ? Sont-ils un allié en paraissant être agréables aux autres ou sont-ils un ennemi, regard provoquant dérangement et haine ? Dans une société où le physique prime sur la profondeur intellectuelle, le regard est le dernier résistant de la véritable identité humaine. En effet, on peut se cacher derrière apparats, chirurgie et faux-semblant, les yeux, eux, ne peuvent mentir. La volonté d'être juste commence alors en ne jugeant pas sur l'apparence de l'autre mais sur la profondeur de son regard et la force de ses yeux.